Unhinged
- wrebek
- 16 août 2019
- 4 min de lecture
La ménopause ou ce moment où le corps des femmes prend en feu pis pas dans le sens sexy de l’expression.

Il y en a qui ont tendance à appeler ça aussi «le moment où les femmes deviennent folles». Facile de tout mettre sous l'étiquette «les filles sont folles anyway». Cette étiquette-là s’attache à nous souvent bien avant la ménopause de toute façon. Mais la ménopause, c’est comme un remake de tes pires SPM, avec Charlize Theron dans le rôle-titre. Elle est ben belle et a l’air d’un calme olympien, mais elle peut te péter une coche comme pas une. (Moi, Charlize Theron, elle me fait peur.)
Je veux dire, peux-tu te figurer un état d'être où même tes bobettes te tapent sur les nerfs? Un état où tu ne sais pas toi-même comment tu te sens et encore moins pourquoi tu te sens de même? Quand une chaleur se pressent, t'as comme une fébrilité intérieure. Comme un truc qui frétille pour se sauver de ton corps avant que la grande sueur t'envahisse. Un truc qui pousse un grand "Oh My Gawd! Nooo!" comme dans les films de catastrophe américains.
Pis, pfuit! Plus rien.
T'as eu chaud comme si un soleil t’avais poussé au milieu du corps tout d’un coup, l’eau te pisse derrière les genoux et sur le front, mais tout s'est calmé en même temps. Et tu te demandes si t’es en train d’imaginer tout ça ou si t’as développé un trouble de la personnalité.
C’est impératif de comprendre qu’il n’y a rien de personnel dans ce comportement aléatoire. Que c'est pas moi, ni toi, mais un cocktail d'hormones unhinged dans mon corps. Qu’il y a des moments dans la journée où j’ai l’impression de devoir physiquement tenir tous mes morceaux par en dedans.
Qu’il y a des jours durant la semaine où je passe mon temps à me cogner les genoux sur les tâches qui se cachent dans le brouillard envahissant mon cerveau déserté. Pis encore, j’ai été chanceuse. J’ai eu une période d’éclaircie mentale, après la fin des traitements actifs. Un moment d’énergie et de motivation claires et pures comme un ciel d’octobre. Et juste au moment où je me disais en chuchotant presque : «Tiens, on dirait que ça y est, je pourrais possiblement passer à autre chose.» PAF! Ménopause.
Je l’ai déjà dit, mon traitement est passé à une autre étape. Celle de l’hormonothérapie, un truc de longue haleine. Je ne dirai pas un marathon parce que c’est encore trop près du discours de combattant qui me tape tant sur le système. (Je ne suis d’ailleurs pas la seule à décrier cette imagerie violente). Ça n’a rien à voir avec un marathon non plus parce qu’on ne sait pas quand ça commence ni quand ça finit l’hormonothérapie. On ne choisit pas le départ, c’est notre oncologue qui écrit les prescriptions. On ne choisit pas non plus les détours, quand notre corps tend désespérément vers l’homéostasie et bascule les anti-aromatases et autres anti-hormones par-dessus bord à coups de saignements inattendus, de douleurs au fond des os et d’état dépressif en dents de scie. On ne choisit pas la fin non plus, ce moment incertain et flou situé quelque part entre «5 à 10 ans».
Dans mon cas, ce 5 à 10 ans me mène pas très loin devant la vraie ménopause. Mêmes symptômes, mais rien à voir avec le cycle de la vie.

La ménopause, la vraie, ça fait partie de ton corps, de ton cycle de femme. Une affaire ancestrale, de déesse de la Lune, de danse sentant la sauge et la fumée. Un moment pour lequel existent toutes sortes de tisanes, de produits et de suppléments pour adoucir la pente quand ton corps se met à produire moins d’œstrogène. Bon, rien de magique dans tout ça, j’en suis bien consciente, mais au moins, on a l’impression qu’on peut faire quelque chose.
Dans le cas de la ménopause induite chimiquement, pas de pente, pas de tisane: «c’est paf! tu suite, pas d’dialogue» avec la déesse lunaire. Pas de rituel de sagesse féminine ancestrale. Rien qui pourrait faire remonter un tant soit peu les taux d'estradiol dans mon corps. Parce que ça pourrait nourrir la Récidive. Pis ça, la Récidive, c’est la nouvelle déesse dans mon panthéon personnel. Une pas belle, une pas fine, une pas bonne, mais une capable. Une estie de chienne sale. Une hantise qui sneak dans ton sommeil pis dans tes rêves d’avenir comme un avertissement de smog: tu la vois pas venir, mais tout d’un coup tu tousses pis tu es toute étourdie.

Tout ça pas pour dire que la ménopause et la périménopause «normales» are a walk in the park. Pas du tout. C’est toute une étape dans la vie d’une femme. Mais. Pour l’avoir observé autour de moi et pour, je l’avoue, me l’imaginer, on doit toujours ben s’y attendre un peu plus on approche la cinquantaine. Je veux dire, on sait que ça s’en vient, non? Quand ça te tombe dessus et que tu n’as pas encore 40 ans, c’est quand même un peu plus ébaubissant (et aucunement ébaudissant).
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