top of page
Bouton s'abonner_1080 X 1080 px.png
  • Photo du rédacteurwrebek

Illumination

Dernière mise à jour : 7 mars 2020

L'autre soir, mon chum écoutait du Netflix et du coin de l'oreille, j'ai reconnu dans un bout de trame sonore un extrait de Madame Butterfly. Spontanément, je me suis mise à chantonner cet air que je connais par coeur.


Et je n'ai pas pleuré.
Rien.
Même pas une petite larme.

J'avoue, oui: la musique m'émeut souvent. Et, oui, il m'arrive de verser une petite larme en chantant du Patrick Watson dans ma voiture. Mais ce chant-là, composé par Puccini, il est spécial pour moi depuis... probablement toujours. C’est-à-dire, depuis que j'ai acquis l'habilité de retenir des airs musicaux.


Je vous explique: ma mère, morte d'une récidive de cancer du sein il y a un peu plus de 11 ans, «ma mère chantait toujours». Du moins, jusqu'à ce qu'elle ait «tout son corps qui [penche] par en-avant» courbé sous le poids du fardeau tumoral, comme on dit en jargon médical. Elle chantait, entre autres, Un bel di vedremo qu'on appelait communément entre nous, Madame Butterfly.


Ce soir-là, le soir du Netflix écouté d'une oreille, pour la première fois depuis 11 ans, j'ai entendu cet air sans avoir l'urgence de changer de pièce ou de poste de radio. En fait, ça faisait au moins une minute que je chantonnais quand j'ai pris conscience de ce qui se passait. C'est aussi seulement la deuxième fois que j'écris spontanément sur le sujet. C'est fascinant, mais ce n'est pas étonnant; fascinant le chemin que prend notre conscient à travers le deuil; pas étonnant, parce que depuis quelques mois, je travaille un gros morceau de vie: le pardon.


J'ai lu dernièrement que pardonner, c'est délier les cordes et les attaches du passé qui draine notre énergie vitale. C'est une ben belle phrase pour dire: «Pardonner, ça te décrotte le coeur en ostie!»


Ces petites, moyennes et grosses crottes qui s'accrochent à ton petit coeur, comme les feuilles d'orme durant l'hiver. Au moindre petit coup de vent, t'entends toutes ces petites feuilles brunes shaker, trembloter, capoter. Pareil pour les bouts de trucs qu'on n'a pas pardonnés, ces feuilles-crottes-cordes (OK, faut que je me branche sur mes métaphores!). À la moindre bourrasque de la vie, ces feuilles mortes métaphoriques frémissent en nous jusqu'au fond de nos échos passés. Et pis là on réagit, sans penser, par automatisme, par protectionnisme.


Plus je réfléchis et j'explore le territoire du pardon, plus je m'aperçois de l'ampleur de ses ramifications. Parce que, le pardon, est-ce que ce n'est pas un peu le cousin du fameux «laisser-aller» que la philosophie du moment, un peu nouvelle-âgiste il est vrai, nous suggère fortement comme la solution à nos problèmes?





Ne pas pardonner, autrement dit, garder nos tites crottes bien au chaud dans notre coeur, c'est s'agripper de toutes nos forces après une tite branche même s'il fait froid et qu'on voudrait aller s'abriter du vent, sous la neige. C'est ce qui m'a fait allumer sur le fait que certains de mes comportements s'étaient construits entièrement sur des non-pardons. C'est quand même fort non? Des comportements qui sont pratiquement des traits de personnalité rendu là tellement ils sont intégrés dans ma façon de réagir aux événements.


Et là, à ce point dans ma réflexion, j'ai eu une illumination mineure: ma peur de la récidive, est-ce qu'elle n'est pas fortement angoissante parce que j'ai l'impression que prévenir une récidive, it's on me? C'est vrai quoi, la peur de la récidive, c'est un peu une forme d'anticipation, de «non-laisser-aller». Mais pour moi, et c'est là que ça devient intéressant, j'ai l'impression que cette peur est aussi liée au fait que je n'ai ni pardonné à ma mère d'avoir attendu plus d'un an avant de nous annoncer qu'elle avait un cancer ni pardonner au radiologue qui m'a fait traîner pendant trois mois avant de demander enfin une biopsie de cette masse «qui faisait mal et qui ne pouvait donc pas être du cancer». Et, surtout, ni pardonner à moi-même de ne pas avoir défendu plus fort ma profonde conviction que cette masse était cancéreuse. Parce que la limite entre «laisser-aller» et «négliger» elle aussi est mince.


Conclusion: je ne suis pas certaine d'avoir encore vraiment compris grand-chose au pardon et ses cousins, mais ça fait un bien fou de balayer ses petites crottes hors de son coeur!


 

Life is a messing thing

Cycling through seasons

Mixing old death with new growth



39 vues0 commentaire

Posts récents

Voir tout
bottom of page